Paroles de résistants ! Deux anciens témoignent face aux collégiens d'Issoudun

Deux anciens résistants, Georges Chéry et Claude Dugénit, racontent à de jeunes collégiens issoldunois leurs histoires et leurs engagements au sein de la Résistance dans l'Indre, pendant la Seconde Guerre Mondiale. Ce film a été réalisé par l'historien Jean-Louis Laubry, spécialiste de la vie politique d'Issoudun durant la première moitié du 20e siècle. Dans les années 90, il a capté la parole d'anciens résistants de l'Indre qui témoignent face caméra.

Issoudun, 1940. La France perd la guerre face à l'Allemagne nazie et Pétain signe l'armistice qui sonne le début de l'Occupation. Le département de L'Indre est en « Zone libre » mais très proche de la ligne de démarcation qui le sépare de la « Zone occupée ». Le Cher est coupé en deux : Vierzon est sur la ligne et Bourges est « occupée » . En France, la Résistance s'organise un peu partout, prenant diverses formes.

Claude Dugénit est un des premiers résistants de l'Indre. Avec ses frères, Jacques et Albert, il installe une imprimerie clandestine à Déols, au nord de Châteauroux. Il est arrêté en 1941 pour distribution de tracts. Après deux ans de travaux forcés dans un centre pénitentier dans le Puy-de-Dôme, la Centrale de Riom, puis dans le centre de détention de Mauzac en Dordogne, il est libéré en 1943 et entre alors dans la clandestinité. Il agit aux côtés des Francs-tireurs et partisans à Lyon et participera à la libération du Tarn et de l'Aveyron. Toute sa vie durant, il œuvrera très activement à la transmission de la mémoire de la Résistance auprès des jeunes.

Georges Chéry travaillait dans l'usine de construction aéronautique Bloch (de Marcel Dassault) qui devient la SNCASO en 1936, la Société Nationale des Constructions Aéronautiques du Sud-Ouest. En 1940, elle est saisie par les autorités allemandes. En 1942, il adhère au Parti Communiste. Après la signature de l'armistice, il devient responsable à Châteauroux d'un groupe de résistants dont la mission était de distribuer des tracts et des journaux. Début Juin 1944, il rejoint le maquis des Francs-Tireurs et partisans français (F.T.P.F) à Jeu-les-Bois (Indre). Au moment du Débarquement, il fait parti du groupe des maquisards de la ferme des Laboureaux, attaqués par une colonne allemande le 12 Juin 1944. Il est fait prisonnier mais réussira à s'évader. Il participera, au moment de la Libération à la gestion du Débarquement.

Leurs témoignages abondent de détails et nous plongent dans une histoire sombre, notre Histoire commune. Leurs récits alternent entre faits maintenant bien connus et documentés de l'histoire de la Résistance et leurs expériences pendant cette période.

La distribution de tracts, les journaux, les sabotages, les hold-up, les planques, le ravitaillement, mais aussi la collaboration des administrations et de la police, les milices, les soldats allemands, l' « hitlérisme »  : tous les aspects de la Résistance et de la vie sous le régime de Vichy sont abordés par les deux anciens résistants.

« Pierre George, « Fabien » qui a descendu le premier allemand au métro Barbès-Rochechouart […] c'est le premier acte de résistance. »

 « Le reptile se gratte l'oreille ...Le reptile se gratte l'oreille […] Quand nous entendions ce message deux fois dans la journée, nous savions que dans la nuit qui suivait, des avions lanceraient du matériel. »

 « Les jeunes filles ont joué un rôle important en tant qu'agent de liaison entre les maquis, elles parcouraient parfois jusqu'à 70km par jour sur leur vélo »

 « Les premiers résistants, c'étaient ceux qui savaient ce qu'était Hitler. Dachau, le premier camp de concentration c'était pour mettre d'abord les communistes, après les socialistes, tous les opposants. Y'a quand même des gens, qui sont sortis de ces camps de concentration et qui ont pu dire ce qu'il se passait. »

La force du témoignage à la première personne nous projette à leurs côtés et nous permet de saisir, de manière intime, les enjeux de l'époque. Les jeunes, sans détour, interrogent les deux anciens. Face aux questions qui fâchent, face à la question qui tue, les résistants confient avec une émotion palpable le grand dilemme auquel chaque combattant est confronté quand il faut survivre.

Leur engagement, au péril de leur vie, nous oblige à réagir : « Et moi ? qu'aurais-je fait ? ».

Leurs paroles nous rappellent à notre devoir de mémoire et de citoyen : rester en alerte face aux résurgences du fascisme, de la xénophobie et du racisme. Protéger nos libertés, la démocratie, la paix.

Pour reprendre le flambeau de nos aînés, Jean-louis Laubry, aux côtés d'autres membres de l'association des Amis du centre d’histoire et de mémoire de la Résistance et de la déportation (ACRDI) porte un projet de création d'un Musée de la Résistance à Châteauroux qui devrait ouvrir ses portes au Printemps 2026. L’agence Ciclic, en tant qu’archive régionale du film, est associée au projet. Le service Patrimoine est membre du conseil scientifique et les collections audiovisuelles feront parties du corpus de l'exposition.  

Jean-Louis Laubry

En 1992, Jean-Louis Laubry est professeur d'histoire-géographie au collège Diderot à Issoudun et il organise chaque année la venue d'anciens résistants dans les classes pour un échange avec ses élèves. Les deux anciens résistants sont adhérents de l'Association Nationale des Anciens Combattants de la Résistance (ANARC) et ils se consacrent à transmettre les valeurs de la Résistance en tant que "Passeurs de mémoire".

Jean-Louis Laubry est aujourd'hui professeur d'histoire contemporaine à l'Institut National Supérieur du Professorat et de l'Éducation Centre Val de Loire, sur les antennes de Châteauroux et de Bourges.