Le Jamboree de la Paix

Les vacances de l'été 1947 de Paul Masson furent bien chargées. Six bobines déposées par sa sœur auprès de Ciclic, retracent son périple à travers la région Centre-Val de Loire, l'Eure-et-Loir et les Yvelines. Il filme au mois d'août un événement unique en France et extrêmement symbolique pour la jeunesse de l'après-guerre.

Le Jamboree de 1947 se tînt du 9 au 20 août. Ce fût le Sixième jamboree mondial, dit "Jamboree de la Paix", et un bel exemple de solidarité et d'enthousiasme international.

Il se déroula à Moisson (actuel département des Yvelines) dans une vaste étendue de la vallée de la Seine choisie l’année précédente par l’association du Jamboree. Cette structure fut créée en décembre 1944 par les quatre associations masculines du scoutisme français : les scouts de France (catholiques), les Eclaireurs de France (laïques), les Eclaireurs unionistes de France (protestants) et les Eclaireurs israélites de France (juifs).

Le 25 avril 1945, 40 000 scouts et guides (jeunes filles) défilèrent sur les Champs-Elysées en présence de Lady Baden-Powell, épouse du créateur du mouvement, Lord Baden-Powell (1857-1941), préfigurant ce grand rassemblement international de la jeunesse.Le comité d’organisation présidé par le général Laffont, chef du scoutisme français, et André Lefebvre, dit Vieux Castor, commissaire général adjoint du Jamboree et dirigeant des Eclaireurs de France organisa avec l’aide précieuse du général De Lattre de Tassigny cette manifestation symbolique, soutenue par le Ministère de l’éducation qui épaula l’Association du Jamboree à hauteur de 130 millions de francs.

Un film promotionnel fût tourné afin d’expliquer à l’ensemble des troupes et des clans répartis sur le territoire français le principe de la rencontre et de la "Mission de l’accueil". Une période de quinze jours, précédant le Jamboree, avait pour but d’organiser l’accompagnement des milliers de scouts arrivant par mer, air, route et train sur le territoire national en plein redressement.

Pour le gouvernement français, le Jamboree permettait d'affirmer le retour de la France sur la scène internationale.

Les participants représentaient 44 nations et 5 cultes différents (catholique, protestant, israélite, musulman, orthodoxe) en dehors des troupes laïques. La délégation française était formée de 8 troupes Scouts de France, catholiques (SDF), 3 Eclaireurs de France, laïcs (EDF), 1 Eclaireurs Unionistes, protestants (EU) ainsi que de 4 troupes d'île-de-France et 1 troupe d'Océanie. S'y ajoutait la délégation étrangère forte de 23 troupes anglaises ou de l'Empire britannique, 7 suisses, 7 norvégiennes, 2 mexicaines.

Paul Masson déambule dans ce vaste campement filmant l'ambiance générale. Au Camp Algérie, on voit les scouts d'Alger et les éclaireurs israélites de France posant avec leurs oriflammes. Le camp Bourgogne accueille les scouts de Grande-Bretagne et Dominions du Commonwealth britannique dont le sous-camp écossais et son portique des scouts du Renfrewshire.

Le camp Flandres accueillait le sous-camp mexicain et le sous-camp Liban-Egypte. Paul Masson y filme la préparation de la popotte, le repassage à l'aide d'un groupe électrogène système D.

Il s'attarde au célèbre sous camp “Lorraine" ou le contingent lorrain, dirigé par Étienne Peyre et François Balland, se fît remarquer par un incroyable bateau terrestre nommé "Pourquoi Pas ?" et construit sur place : 40 mètres de long, 21 mètres de haut. Ce navire immobile avait nécessité une organisation importante. Il fut inauguré le mardi 12 août par le ministre de la Marine, M. Louis Jacquinot accompagné de l'Amiral Ortoli, directeur des Ecoles de la Marine et de nombreuses personnalités civiles et militaires. Les scouts s’y entraînaient pour l’obtention d’un brevet de gabier valable dans la marine.

Le train "ex-Maginot" servit à véhiculer les 30 000 scouts et 300 000 visiteurs pendant la durée des rencontres. Un bureau de poste et télégraphe avait été installé pour l'occasion, ainsi qu'une banque, un marché d'échanges et même une police intérieure.

Pour parfaire cette organisation, un port avait été aménagé sur la Seine. Il était géré par les 500 scouts marins présents sur le site où ils assuraient traversées de la Seine et jeux aquatiques.

Paul Masson est né le 8 mars 1918 à Aulnay-sous-Crécy (Eure-et-Loir) et est décédé en 2003 à l’âge de 85 ans. Il était typographe et a travaillé chez Firmin-Didot au Mesnil-sur-l'Estrée jusqu'à sa retraite. Il commence à faire des photos en 1936-1937. Prisonnier en 1939, il est libéré, sa mère ayant fait valoir qu’il était “soutien de famille“. Il commence à filmer la guerre terminée, ses premières images concernent les fêtes de la Libération en 1945 et le Jamboree de la Paix de 1947 à Moisson (Seine-et-Oise). Membre fidèle des auberges de la jeunesse, mouvement très dynamique à cette époque, il faisait beaucoup de camping sauvage à la rencontre des autres et voyageant en solitaire sur sa petite motocyclette.

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