Le Blanc : Naissance d'une maternité.

Nous sommes en 1968, alors que le centralisme économique est encore le fer de lance étatique, la politique de santé s'oriente progressivement vers l'accessibilité au soin à tous.

C'est dans cette perspective qu'un chantier dans la ville du Blanc est lancé. L'hôpital et son service maternité voient le jour derrière la caméra d'Antoine Dujardin, chirurgien de son état et cinéaste amateur. Revenons en archive sur la naissance de cette maternité, aujourd'hui "avortée" depuis le 27 juin 2018... 

C’est en 1952 qu’Antoine Dujardin s’installe comme chirurgien à l’hôpital du Blanc. À l’époque la chirurgie et la maternité ne se trouvent pas dans les murs de l’hôpital. La chirurgie se trouve à l’emplacement de la maison de retraite, rue Saint-Lazare et la maternité se trouve rue Aristide Briand dans les locaux de l’ancienne clinique privée, celle du Dr Cauvy.

Mais la recrudescence du nombre de patients ainsi que l'évolution progressive de la médecine "rurale" dans la décennie 1960 vont faire évoluer le territoire médical français. C’est la raison pour laquelle la construction d’un nouveau pavillon de chirurgie-maternité dans l’enceinte de l’hôpital a été décidée.

Les travaux ont débuté en mars/avril 1968 pour se terminer fin 1970. Antoine Dujardin a filmé ces travaux avec une grande attention chirurgicale ! En effet, il savait qu’il allait être l’un des principaux concernés par cette nouvelle construction.

Vous pourrez le constater par vous-même mais sur ces images, nous retrouvons (entre autres) : M. Viguier, directeur de l’hôpital et l’architecte, Jean Ganne. L'entreprise en charge des travaux n'est autre que l’entreprise Dallay d’Yzeures-sur-Creuse.

On peut voir les étapes se succéder : Le sous-sol du pavillon a été creusé ; La grue est en passe d’être érigée ; On établit des passages de communication avec le bâtiment préexistant.

D'ailleurs, alors que la grue est opérationnelle, on peut voir sur la droite un préfabriqué. Il s'agit sans doute de l’Unité de Dépannage (qui disposait de lits supplémentaires). Enfin les fondations sont coulées.

Au sous-sol du nouveau pavillon, vont se retrouver : la chaufferie, la morgue et une salle de réunion. C’est au niveau du sous-sol que l’on fait le raccordement avec les bâtiments préexistant de l’hôpital.

Il est intéressant de constater avec quelle minutie et quel sens du détail, Antoine Dujardin filme cette construction. La pratique d'un cinéaste amateur peut être relative à la vie professionnelle du cinéaste. Ici Antoine Dujardin nous montre à quel point il met un point d'honneur à être fidèle et respecter toutes les étapes de construction.

Alors que les ouvriers continuent à oeuvrer sur le chantier, place à un évènement important : la pose de la première pierre du pavillon par les autorités locales. Il faut dire qu'il y aura un avant et un après. En effet, le service maternité rencontrera un franc succès et ce jusqu'à nos jours. Nous retrouvons à l'image le maire André Gasnier et plus tard le préfet de l'Indre et le sous-préfet du Blanc. 

Pour information, notre cinéaste amateur, Antoine Dujardin, a fait partie du conseil municipal au Blanc de 1956 à 1980.

Les hommes se dirigent vers la cour de l’hôpital. M. Viguier, directeur de l’hôpital, ouvre la marche ; suivi le préfet, le sous-préfet et le maire du Blanc sous le regard des journalistes. 

Au rez-de-chaussée se trouve la maternité. Elle comprend à cette époque, la laverie, la stérilisation, une nurserie, des chambres (une vingtaine de lits) et deux salles d’accouchement.

Au 1er étage, se trouvent la chirurgie avec deux salles d’opérations, la stérilisation, des lits (environ 20), et les bureaux du chirurgien et des infirmières.

Au 2e étage, ce sont environ 30 lits pour les patients de la chirurgie. Il est important de préciser, qu’au même moment il y a eu d'autres aménagements : la radiothérapie, le radiodiagnostic et la construction des services généraux. 

La presse de l'époque évoque un coût de construction de ce pavillon à 3 495 975 francs.

La maternité du Blanc voit rouge...

Comme évoqué plus haut, la maternité du Blanc a, et ce malgré de multiples mouvements de protestations, fermé ses portes le 27 juin 2018. Après plus de 40 ans de service, c'est un poumon du service public public français qui cesse de respirer. Cet article a pour vocation de célébrer le passé glorieux de cet établissement, de ces femmes et hommes qui ont permis de faire naître un grand nombre de Berrichons. Peut-être vous ?

Antoine Dujardin, un homme, une carrière, une mission ... 

Né le 5 mai 1920, Antoine Dujardin fut un élève brillant dès ses études secondaires puisqu’il fut lauréat du concours général en philosophie. Sa culture générale, en particulier littéraire, était grande et il était capable, des décennies après ses humanités, de réciter des tirades entières d’auteurs classiques.

Il entreprit ses études de médecine. Là aussi il fut très brillant : externe puis interne des hôpitaux de Paris, chef de clinique des hôpitaux. Il se spécialisa en chirurgie. Il s’installa au Blanc en 1952, travaillant d’abord à la fois à l’hôpital et à la clinique chirurgicale de la rue Aristide Briand, puis seulement à l’hôpital après que l’établissement annexe ait été transformé en maternité. Quelques années plus tard, il devint le premier chirurgien plein temps de France.Grâce à son courage, à ses qualités chirurgicales et à son ingéniosité, il transforma en quelques années un service de chirurgie archaïque en un service de chirurgie "de pointe" pour notre région, où il pratiquait des interventions jusque-là réservées aux grands hôpitaux ; et cela dans des conditions souvent bien difficiles. L’activité de son service, toujours plein, etait telle, qu’il fût agrandi à deux reprises.

Antoine Dujardin était aussi aimé de son personnel, en particulier de son personnel de bloc. Tous avaient pour lui une respectueuse déférence. Ces hommes et ces femmes appréciaient sa gentillesse, admiraient ses compétences tout en le redoutant.

Les premières années de son exercice au Blanc furent particulièrement dures. Il n’y avait pas d’internes, il était de garde vingt-quatre heures sur vingt-quatre et, pour une simple plaie, il lui fallait se lever en pleine nuit et se rendre à l’hôpital. N’oublions pas non plus ces années où il ne put partir en vacances, n’ayant pas trouvé un remplaçant "valable". Dans les dernières années de son activité, sa joie fut grande d’avoir à ses côtés, à partir de 1980, son fils Christian, orthopédiste, qui pratiquait aussi la chirurgie artérielle. Ils formaient tous les deux une remarquable équipe qui ne rechignait pas à la tâche. 

Excellent confrère dont la porte était toujours ouverte et l’oreille attentive à toute suggestion ou critique pour le bien du service, estimé de tous ses correspondants, il était bien normal qu'il ait été élu au conseil départemental de l’Ordre des médecins où ses avis pertinents étaient toujours écoutés. 
Pour ces mêmes raisons d’estime, il devait être élu conseiller municipal de notre ville durant plusieurs mandats. Antoine Dujardin fut aussi un homme aux multiples talents puisqu’il devait goûter successivement aux joies du sport automobile, à la voile sur l’étang de la Gabrière, à l’aviation (il avait appris à piloter), à la pêche à la ligne, au bridge, à la photographie et, en particulier après sa retraite, au jardinage et à sylviculture. Il se lançait à fond dans chaque activité, préparait des fiches sur le sujet avec la même rigueur employée naguère pour établir ses fiches de questions d’internat.

Il quitta l’hôpital du Blanc et fut remplacé par le docteur Narcisse Ledoux qui, de 1962 à 2000, a anesthésié des milliers d’opérés. Sa compétence, sa rigueur, sa gentillesse et sa disponibilité nuit et jour étaient bien connues et appréciées de tous les patients et de tous ses confrères. Antoine Dujardin était officier dans l’Ordre national du Mérite, officier du Mérite du sang, chevalier de la Croix rouge et titulaire de la médaille des Collectivités locales.

Il est décédé le 24 décembre 2012. Ses obsèques ont été célébrées en l’église Notre-Dame de Châteauroux. 

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