Plein Cadre Sur Camille Blanchard, l'aventurier mondain !

Sur les quelques images que nous avons de lui, Camille Blanchard a toujours le coin de l’œil rieur. Chirurgien-dentiste à Châteauroux, ses films révèlent une personnalité joyeuse, curieuse et amoureuse de la vie. Découvrez dans ce portrait en images, un homme qui a su capter, dès les débuts du cinéma amateur, les évènements marquants de sa vie personnelle mais aussi de son époque, nous laissant en héritage un formidable témoignage sur la grande bourgeoisie d'avant-guerre.

Camille Blanchard est né à Issoudun le 2 juin 1890 d'une famille indrienne très aisée. Il devient lauréat et diplômé de l'école dentaire de paris et choisit de s'installer chirurgien-dentiste dans trois cabinets de l'Indre dont Châteauroux. Il se marie avec Jeanne Lenseigne et a deux enfants Marie-Thérèse Gervais Blanchard née en 1920 et décédée dans les années 2000 et Jean-Marie né en 1924 et décédé en 2007. Curieux et passionné de nouvelles technologies il s'achète dès 1924 une caméra Pathé Baby 9,5mm et filme, quand son travail lui en laisse le temps, les événements de sa ville ou de sa région.

Un de ses plus anciens films se déroule en 1925 à Issoudun, le jour d'une kermesse paroissiale dans le parc de la Visitation du château de Bonneval. Un effet de voilage blanc en surimpression, insuffle aux images une ambiance fantomatique rappelant la mystérieuse fête du Grand Meaulnes.

Passionné de belles berlines et de voyages, Camille Blanchard alliera ses deux hobbies lors de rallyes automobiles à travers l'Europe et l'Afrique du Nord, qu'il effectuera entre amis mais le plus souvent en famille. En 1937, il entreprend au volant de sa Delage, une course à travers l'Autriche et l'Allemagne captant dans les rues de Munich la montée du nazisme avec des images de passants faisant le salut nazi à des soldats en faction ou en 1938 dans Voyage en Europe de l'Est un défilé de la jeunesse hitlérienne à Budapest en Hongrie. Son fils Jean-Marie est du voyage, héritier de la même vitalité paternelle, il apparaît très souvent comme dans ce film "Rallye en Europe" une caméra à la main, braquée vers celle de son père.

L'Afrique du Nord et la Méditerranée font partie de ses destinations préférées, comme en témoignent les images rares d'une fantasia au Maroc en 1925. En 1933 c'est de nouveau en famille, cette fois avec sa Citroën C6 qu'il embarque, pour une croisière qui va le conduire de Tanger à Rabat et Alger avec une halte à Majorque. Sa caméra toujours à portée de main, Camille Blanchard, filme des scènes de vie, parfois au plus près des habitants, dans les rues animées et les marchés de ces villes où le tourisme de masse n'est pas encore présent.

Lorsqu'ils ne sont pas à l'étranger, les Blanchard séjournent à l'hôtel de l'Océan de Pornichet et tous se prêtent au jeu du cinéaste amateur en posant devant sa caméra sur la plage et sous les tentes à rayures ou en dansant sur la terrasse de l'hôtel, le soir autour d'un apéritif. Dans le film À Pornichet, on découvre un montreur d'ours dans une longue scène filmée sur la digue face à la plage. Cette démonstration publique originaire des balkans, disparaîtra entre-deux-guerres et n'est plus pratiquée que dans certains cirques. Le fils Jean-Marie, reste un sujet de prédilection et l'objectif le suit courant après sa sœur, faisant du cheval, se baignant ou entouré de ses élégantes tantes, assis sur le gros ballon marqué Arthur Mathé, du club de sport de la plage de Pornichet.

La famille Blanchard possède également une résidence secondaire à Monaco, au 9 bis du boulevard de Belgique, l'immeuble « Palais de l’Etoile » dont le toit-terrasse dispose d'une vue imprenable sur le Palais princier. Camille Blanchard se retrouve donc aux premières loges pour immortaliser en 16 mm couleur cette journée du 19 avril 1956, où la ville en liesse décorée de mille drapeaux américains, français et de la principauté, fête le mariage de Grace Kelly et du Prince Rainier. La rareté et la qualité de ces images amateurs sont telles, que l'Institut Audiovisuel de Monaco a souhaité les conserver dans ses propres collections. 

Ses séjours dans la principauté lui donnent l'occasion d'immortaliser d'autres festivités comme le carnaval de Nice en 1948, le centenaire de Monte-Carlo en 1966 ou de belles balades en bateau et de baignades dans les années 1950. 

                            

De retour en Berry, son métier de dentiste, allié à sa passion de l'image, lui confèrent en toute légitimité le droit de filmer un événement spectaculaire qui se déroule dans le cinéma l'Apollo de Châteauroux. En effet, le 4 janvier 1933, Camille Blanchard filme la pose de trois implants dentaires en or sur le lion Prince, alors en représentation sur la scène de l'Apollo avec la danseuse et dompteuse Sarah Caryth. Son film Soins dentaires sur un lion, de presque 3 minutes, un peu sombre au vu des conditions de tournage, reste un de nos témoignages amateurs le plus insolite et original. Des opérateurs Pathé ont eux-aussi filmé cette scène intitulée "Prothèse dentaire sur un lion" et diffusée dans le Pathé Journal du 8 février 1933.

À l'instar de la majoité des cinéastes amateurs, le personnage le plus attachant des films de Camille Blanchard reste l'entourage familial. Son épouse Jeanne sur laquelle il pose un regard complice jusqu'à la fin de sa vie et ses enfants Marie-Thérèse et Jean-Marie dont il suit l'évolution, les acrobaties et les jeux. Ses amis, toujours prêts à jouer une petite scène de danse ou de rire, l'ont inspiré pour réaliser ce bijou tourné en 1925 Pitrerie à la ferme. Comme pris de folie, un groupe de jeunes gens forme une farandole, grotesque et déglinguée tout en s'asseyant à tour de rôle sur une chaise en grimaçant devant l'objectif. 100 ans plus tard, ces images, qui nous rappellent en écho la fête paroissiale d'Issoudun, ont inspiré les réalisateurs d'un ciné-concert de musique actuelle.

Nous savons encore de lui qu'il était un grand joueur de bridge et aurait même partagé sa table de jeu avec le roi du Maroc à Monaco. En revanche, sa caméra 16 mm n'étant pas conviée à ces rendez-vous, nous n'en avons pas la preuve en images....

Terminons ce portrait par ces quelques plans réalisés par son épouse Jeanne, Camille découvrant un jeu offert à son fils sur la plage de Pornichet ou en blouse de travail donnant à manger à ses colombes blanches qu'il affectionnait tant, dans le jardin de sa maison rue de la Gare à Châteauroux. 

 

Camille Blanchard meurt le 14 juin 1986, à l'âge de 96 ans. Son fils Jean-Marie sera un des tout premiers déposants de films aux archives de Ciclic Centre-Val de Loire en 2007. Son petit fils Gérard, qui se souvient avec tendresse de ses grands-parents chez qui il passait ses vacances à Monaco, demeure le dernier fil d'Ariane qui nous relie à ces images bientôt centenaires..

Nous vous laissons découvrir tous ses films mis en ligne sur notre site mémoire.ciclic.fr. Bon voyage du Berry au Maghreb ...

Dans le cadre de la réalisation de ce portrait sur Camille Blanchard, Ciclic Centre-Val de Loire souhaite remercier l'Institut Audiovisuel de Monaco pour son dévouement aux images amateurs et son soutien durable. 

Camille Blanchard entre dans la collection "Plein Cadre Sur", série de portraits de cinéastes amateurs créée par Ciclic Centre-Val de Loire en juin 2020, diffusée sur Mémoire et sur Facebook-Ciclic-Mémoire.

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